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L’organisation de la chefferie traditionnelle

Faisant partie intégrante du royaume coiffé par la chefferie royale l'organe suprême qui exerce son autorité généralement sur plusieurs cantons, le pouvoir local traditionnel est essentiellement constitué de la chefferie de canton et de la chefferie de village. Ce que l'on retrouve un peu partout dans la Côte d'Ivoire traditionnelle.

La chefferie de canton
Cette structure a été absente chez certains peuples de Côte d’Ivoire. Mais la colonisation l’a introduite partout où elle a été absente, par exemple à l’ouest. Il ne s’agit donc pas d’une création de la colonisation mais plutôt d’un système d’autorité qui existe depuis fort longtemps. Le canton que certains appellent la tribu est une division territoriale comportant un certain nombre de structures. Il reflète une réalité sociologique caractérisée par un peuple uni par la même histoire et les mêmes traditions.

Le canton se compose de plusieurs villages coiffés par une chefferie basée dans l’un des villages. C’est la chefferie de canton. Ce village qui abrite la chefferie de canton représente le centre de l’organisation politique et administrative du canton. Le chef de canton qui est aussi le responsable de son village est subordonné au roi mais ne tient pas son pouvoir de lui. Il est lié au territoire et au village qu’il administre. Les chefferies des villages du canton reconnaissent qu’il est leur chef mais elles sont autonomes. Le chef de canton ne gouverne pas seul, même s’il apparaît comme un personnage hors du commun, du fait qu’en plus de ses attributions, il incarne un pouvoir mystique . Il a toujours autour de lui un groupe de notables qui sont ses conseillers qu’il consulte pour prendre les décisions importantes. En réalité ce sont ses conseillers qui dirigent à l’ombre du trône. L’Afrique noire est par excellence la terre où les conseils politiques qualifiés de palabres ont toujours dominé les structures du pouvoir.

La chefferie de canton possède de très larges pouvoirs en matière de tribunal coutumier. Les conflits entre personnes de villages différents sont jugés par le tribunal de canton. Lorsque dans un village, l’une des parties en conflit n’est pas d’accord avec le jugement rendu par le tribunal du village, elle peut faire appel auprès du tribunal de canton qui est présidé par le chef de canton . Comme le fait remarquer M’Bra Ekanza, « dans l’Afrique traditionnelle, le chef ne se conçoit pas sans pouvoir judiciaire ».

La chefferie de village
La chefferie de village qui a pour charge la gestion du village, entité territoriale de base, est l’institution politique et administrative la plus importante du village sinon « le gouvernement du village » pour reprendre une expression de Andoh Isaac5. Le village est le territoire occupé par des personnes ayant le même passé, par exemple les descendants d’un même ancêtre, le lignage. Outre, les villages lignages, on trouve dans les villages du Nord de la Côte d’Ivoire d’autres caractéristiques à savoir que dans ces villages l’on rencontre des quartiers pour forgerons, pour griots, etc. Le royaume de Bouna au Nord de la Côte d’Ivoire illustre bien cette organisation sociale.

Disposant d’une grande autonomie, la chefferie de village reconnaît qu’elle constitue l’autorité de base de l’Etat comme chez les Akan, ce qui n’implique pas forcément son indépendance totale à l’égard des autres autorités supérieures, notamment la chefferie de canton. A la tête de la chefferie de village se trouve le chef qui est l’âme et le porte parole du village. La fonction de chef est en général héréditaire. Dans le village, il est d’abord le gardien des biens et le dépositaire de la coutume. Veiller rigoureusement sur le respect de la coutume est l’une de ses responsabilités essentielles car l’un des rôles importants du chef de village est de faire observer les prescriptions de la coutume. L’aspect aussi sacré de son pouvoir fait du chef un personnage qui représente la puissance aux yeux de ses sujets. Il est juge et à ce titre, il arbitre les personnes en conflit.

Pour administrer le village, le chef de village s’appuie sur le conseil des notables qui constitue la chefferie de village. Ce mode d’exercice du pouvoir est conforme aux règles coutumières qui ne peuvent en aucun cas être violées par le chef de village. Au sein de la chefferie les tâches ne sont pas très largement réparties comparativement à la chefferie royale. Le chef de village exerce presque toutes les fonctions supérieures. Quelquefois lui échappent les fonctions liées à la répartition des terres et à l’organisation des cérémonies. On voit que la vie politique et administrative du village est organisée autour de la personne du chef. Il ne faut pas croire que le pouvoir politique est l’affaire d’un seul individu en la personne du chef de village. Sur ce point nous rejoignons un auteur comme G. Nicolas qui écrit « rares sont les sociétés africaines au sein desquelles le pouvoir politique est exclusivement confié à un individu »6.

La chefferie traditionnelle ainsi schématiquement présentée, va être associée à la structure locale du pouvoir colonial, ce qui va poser un certain nombre de problèmes entre les deux structures.

Extrait de « Recherches sur l’exercice du pouvoir local En côte d’Ivoire »
Par N’dri kouadio

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