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L’histoire de la terre d’Eburnie

L'actuelle Côte d'Ivoire s'étend sur un espace qui comprend la région côtière et forestière du Golfe de Guinée autrefois appelée Côte des Dents ou Côte de l'Ivoire, et tout l'arrière-pays, qui se transforme progressivement en savane, jusqu'à environ 11° de latitude Nord.

La Côte des Dents était la partie de la côte de Guinée, comprise entre la Côte des Graines et la Côte de l’Or, dont les limites étaient à l’Ouest le cap des Palmes, à l’Est le cap des Trois-Pointes. Elle tirait son nom de l’ivoire que les Européens venaient autrefois y chercher. Mais, comme la Côte de Malaguette, elle avait dès le début du XIXe siècle cessé de mériter son nom, car l’ivoire, comme la malaguette (une épice), n’était plus dans ces régions un article d’exportation considérable.

Les Européens – Portugais, Français, Danois, Hollandais, Anglais -, ont parcouru la côte dès le XIVe siècle, mais leurs comptoirs commerciaux ne datent que du XVIIIe siècle,. Après l’abolition officielle de la traite esclavagiste, on en retira de l’huile de palme, des gommes, des bois de teinture, parfois encoure un peu d’ivoire et un peu d’or. On y importait en échange des tissus, du genièvre, du rhum, de la verroterie, de la poudre et des faïences. A partir de la seconde moitié du XIXe siècle, les Français commencent à acquérir des positions de plus en plus solides et, après avoir été un temps presque complètement supplantés par les anglais, finissent par expulser tous leurs concurrents. Au cours des dernières années de ce siècle, ils prennent aussi position dans l’arrière-pays et s’assurent une continuité territoriale avec leurs possessions au Soudan Occidental.

Devenue colonie française en 1893 et intégrée à l’Afrique Occidentale Française (AOF), créée en 1895, la Côte d’Ivoire est devenue indépendante en 1960 et a été dirigée pendant plus de trois décennies par Félix Houphouët-Boigny, qui a longtemps bénéficié d’une conjoncture économique très favorable. A sa mort, en 1993, il laisse cependant un pays ruiné à la suite de la chute des cours du cacao et du café, ses deux principales richesses. Le successeurs d’Houphoüet-Boigny, incapables de relever l’économie, et promoteurs, pour des raisons purement électoralistes au départ, d’une idéologie xénophobe, finiront se trouver confrontés à une guerre civile, qui éclate en 2002, . depuis, le pays en deux: le Nord, contrôlé par la rébellion, le Sud, par les troupes loyalistes. Témoin de ce conflit dont on a exacerbé le caractère ethnolinguistique, le tracé de la ligne de séparation entre rebelles et loyalistes, qui correspond en gros à celui de la limite entre les zones habitées par les principaux groupes de populations: les « Soudanais », Mandé et Voltaïques (Gur), au Nord, et les « Forestiers », Krou et Kwa (Akan) au Sud.

Le peuplement de l’espace ivoirien

L’actuelle Côte d’Ivoire regroupe quatre ensembles principaux de populations. Deux au Nord, dans la zone des savanes, et qui se rattachent aux populations soudanaises musulmanes: les Mandé (Malinké, Dan, Tura, Dioula, Gouro, etc.), à l’Ouest, et les langues voltaïques du groupe Gur (Sénoufo, Lobi, Loro, Koualango) à l’Est. Deux au Sud, dans la zone forestière le long de la Côte, qui sont des populations chrétiennes ou animistes: les Krou (Bété, Guéré, Bakwé, Grebo), à l’Ouest, qui sont une population que l’on rencontre aussi au Libéria, et les Kwa (Baoulé, Agni, Attié, Abbey, Ochin, Ebrié, etc.), à l’Est, dont la langue est proche de celle des Achanti (Akan) du Ghana.

Les Ochins occupent le territoire de Grand-Bassam et d’Assinie, à l’Est d’Abidjan; les Agni, dans la même zone et plus au Nord, venus de la Côte de l’Or, s’étaient établis depuis longtemps dans la contrée où ils s’étaient réfugiés pour échapper aux chasseurs d’esclaves; les Ochins n’y sont venus que depuis le XVIIe siècle à peine. Les Baoulé les suivirent peu après.

En 1884, l’acquisition des pays voisins du Grand-Lahou assurait la continuité des possessions françaises sur la Côte de l’Ivoire. Le voyage exécuté par le capitaine d’infanterie de marine Binger, de 1887 à 1889, démontra l’importance des comptoirs de la Côte d’Ivoire et la richesse que pouvait constituer la culture du café, et l’année 1889 fut la véritable date de la fondation de la colonie de la Côte d’Ivoire. Au point de vue administratif, les établissements français de la Côte d’Ivoire comme ceux de la Cote des Esclaves, avaient été rattachés jusque là à l’administration du Gabon, puis à celle du Sénégal; à partir du 1er janvier 1890, la nouvelle colonie forma, avec les Rivières du Sud (Guinée-Conakry) et Porto-Novo (Dahomey / Bénin), un groupe spécial de colonies placé sous l’autorité d’un lieutenant-gouverneur; mais chacune de ces trois colonies avait un administrateur particulier et conservait une certaine autonomie. D’autres missions suivirent, mais sans obtenir de résultats tangibles. En 1892, le capitaine Binger retourna à la Côte d’Ivoire, et compléta la reconnaissance du pays. D’autre part, le capitaine Ménard, chargé de relier les itinéraires du Capitaine Binger avec ceux du Sud-Ouest du Soudan français, mourut à la peine. Le décret du 10 mars 1893 constitua enfin la colonie de la Côte d’Ivoire et son premier gouverneur fut naturellement Binger.

Toutefois, l’arrière-pays restait à explorer: ce fut la tâche qu’accomplit, en 1893, le capitaine Marchand. Elle fut interrompue par l’arrivée des troupes de Samori Touré. La conquête française du Soudan, une colonne expéditionnaire, dont le commandement fut confié au lieutenant-colonel Monteil, défit Samori en plusieurs combats, mais ne put en finir avec lui, faute d’effectifs suffisants. Néanmoins, les dispositions prises par le gouverneur Binger arrêtèrent l’offensive de Samori, et lui permirent de maintenir l’ordre dans la colonie. La défaite et la prise de Samori (1899) permirent enfin à la France de relier la Côte d’Ivoire au Soudan français par une chaîne de postes ininterrompue. A partir de cet instant, le principal établissement colonie resta Grand-Bassam, résidence du gouverneur, et le territoire fut divisé en onze cercles: Assinie, Grand-Bassam, Dabou, Grand-Lahou, Sassandra, San-Pedro, Bereby, Cavally, Baoulé, Indenié, Bondoukou, qui avaient à leur tête un administrateur colonial ou un officier d’infanterie de marine. Un conseil d’appel, composé de de fonctionnaires de la colonie, et un juge de paix a compétence étendue, constituaient le service judiciaire.

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